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Chronique historique - Une surprenante société de construction

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Extrait d’une brochure de la Société de construction permanente de Lévis. Photo : Reproduction de Claude Genest

14 oct. 2022 08:30

Disparue en 1910, la Société de construction permanente de Lévis (SCPL) a joué un rôle au niveau de la construction résidentielle et de l’épargne à Lévis pendant quelque 40 ans.

Par Claude Genest - Collaboration spéciale

Idée britannique du 18e siècle, les sociétés de construction sont des institutions financières essentiellement locales, dont le but principal est de permettre à ses membres d’acheter ou de bâtir une résidence par le biais d’un prêt hypothécaire financé à même les épargnes de ses actionnaires-emprunteurs. Très présentes en Angleterre au 19e siècle, on les retrouve en Amérique, notamment à Philadelphie en Pennsylvanie, mais aussi à Lévis avec la fondation en 1869 de la SCPL.

Les sociétés de construction sont légalisées au Canada au milieu du 19e siècle et la SCPL arrive donc assez tôt à Lévis sous l’impulsion du notaire Léon Roy. Son premier président est le constructeur de voiliers en bois irlandais Thomas Dunn, partenaire d’affaires d’Étienne Samson, mais aussi un grand ami du curé-bâtisseur Joseph-David Déziel.

Les règlements de la société mentionnent, entre autres, que l’objet principal de la SCPL «est d’aider ses membres à acquérir une propriété foncière» ou autres transactions hypothécaires et de permettre à ses membres de «placer de petites sommes d’une manière sûre et rémunérative (sic)». La gestion est sous le contrôle d’un bureau de direction comprenant sept directeurs et les premières transactions débutent au printemps de 1869. Les actionnaires détiennent des votes selon une «échelle» qui plafonne le nombre de votes maximums à dix pour les plus gros actionnaires, contrairement au «un membre un vote» des coopératives d’épargne et de crédit.

Chose intéressante, une deuxième société de construction voit le jour sur la Rive-Sud en février 1875, soit la Société de construction mutuelle de Lévis (SCML) dont le but est de desservir les territoires de Lévis, Saint-Joseph-de-Lévis et Saint-Romuald. Son existence est éphémère et elle est emportée par le contexte économique difficile des années 1870. En fait, la SCML est incapable d’amasser le capital nécessaire à son déploiement, si bien qu’elle cesse ses activités la même année et n’aura été qu’une étoile filante dans le paysage associatif de la grande Rive-Sud. Quant à la SCPL, elle est toujours active en 1897 comme en témoigne une liste des actionnaires de la SCPL conservée notamment à la Toronto Public Library, avant de fermer ses livres définitivement en 1910.

Les sociétés de construction font partie du paysage financier canadien et québécois pendant des années. Un article de Paul S. Berry publié sur le site du musée de la Banque du Canada mentionne que 84 sociétés de construction existent dans 5 provinces en 1905 et que plusieurs demeureront actives même après 1950. Malheureusement, les archives institutionnelles complètes de la SCPL ne sont pas retrouvées à ce jour, ce qui rend difficile de mesurer l’héritage exhaustif de cette organisation sur la Rive-Sud.

Quoi qu’il en soit, ici et là en Amérique les sociétés de construction ont laissé des traces tangibles dans le patrimoine bâti des villes, mais aussi parfois dans la mémoire collective. Un exemple parmi d’autres, le Temple de la renommée des affaires de Cleveland en Ohio a reconnu, à titre posthume, Anton Grdina de la Slovenian Building and Loan Association, où son nom apparaît aux côtés de nul autre que John D. Rockefeller.

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