Par Claude Genest - Collaboration spéciale
Les abords de la gare et de la traverse de Lévis ont déjà été desservis par un ascenseur mécanique. Équipement privé au service d’un monde de marcheurs sans voiture, il permettait de rallier en partie la basse-ville au premier étroit plateau pour le compte de la compagnie de tramway. Construit au début du XXe siècle au coût de 30 000 $, l’équipement est en service seulement quelques années, car il part en fumée dans la nuit du 5 décembre 1910.
On ne sait guère comment débute ce feu qui ravage le temps d’une nuit l’ensemble de la structure en bois qui abrite les équipements mécaniques.
Selon les journaux de l’époque, l’élément destructeur aurait pris naissance dans la partie inférieure. La plupart des quotidiens de Québec s’entendent sur le fait que la cause la plus probable est le poêle de type «tortue» qui sert à chauffer le bureau au pied de l’équipement. Pour un, The Quebec Chronicle parle d’une possible surchauffe de celui-ci tout en mentionnant que l’origine du brasier demeure un «mystère». Notons que la dernière remontée avait eu lieu à 19h30 la veille et que l’incendie s’est déclaré au moins 7 heures plus tard.
Quoi qu’il en soit, ce sont des employés du chemin de fer de l’Intercolonial qui ont vu les flammes en premier au petit matin et c’est, selon le journal L’Événement, un résident du quartier nommé Levasseur qui a téléphoné aux pompiers par une nuit froide et venteuse. De son côté, Le Soleil souligne que c’est le «travail ardu et opiniâtre des pompiers» de Lévis qui a empêché le feu de se propager autour de l’ascenseur. Plus tard le matin, le journal L’Action sociale constate qu’il «ne reste plus debout que le squelette en fer du long couloir qui faisait communiquer la basse-ville avec la haute-ville».
Évidemment les journalistes de l’époque se demandent que réserve l’avenir pour la remontée mécanique en ruines. Pour un, L’Événement raconte que «M. McCarthy, gérant de la compagnie Levis County Railway, a laissé entendre au cours d’une conversation que la compagnie ne reconstruirait pas les élévateurs au même endroit».
Le Soleil arrive au même constat et va plus loin en laissant sous-entendre que l’on «attendra l’érection de l’hôtel du parc Shaw (actuelle Terrasse du Chevalier-De-Lévis) pour reconstruire plus à proximité de l’hôtel projeté». L’histoire réserve parfois de ces surprises qui résonnent encore de nos jours.
Ajoutons que l’auteur spécialiste du sujet, J.R. Thomas Grumley, parle de discussions entre la ville et la compagnie de tramway en avril 1911 en vue de réparer l’élévateur qui n’aboutissent pas et ajoute que les débris sont enlevés en 1913 par la Mercier Machinery Company.
Au bout du compte, l’ascenseur ne sera pas reconstruit. Dans un monde sans voiture, un tel équipement permettait de faciliter une partie de la montée en franchissant un palier sur deux, voire trois. Pour L’Action sociale, il ne fait pas de doute que l’ascenseur était «utile à toute la population du quartier Notre-Dame et aux voyageurs peu habitués aux côtes abruptes de Lévis». Ah si les vestiges pouvaient parler!